H.1.7 viscosité numérique

L'une des caractéristiques de la propagation d'ondes de forte amplitude dans les solides est la présence d'ondes de choc, qui peuvent apparaitre spontanément dans le matériau. Ces ondes de choc se définissent comme une discontinuité (à l'échelle des problèmes habituellement traitésH.7) sur la vitesse, la température, l'entropie...dont les valeurs de part et d'autre du front de choc sont fixées par les équations de RANKINE-HUGONIOT qui découlent de la conservation de la masse, de la quantité de mouvement et de l'énergie :
\begin{displaymath}
\left\{
\begin{array}{rcl}
\rho_0 D & = & \rho (D-u) \...
...c{1}{2} u^2 + \frac{P_0 u}{\rho_0 D}
\end{array}
\right.
\end{displaymath} (H.2)

Avec $D$ la vitesse de propagation du front de choc, $u$ la vitesse matérielle, $P$ la pression et $E$ l'énergie interne. Du fait du mouvement du front de choc par rapport au maillage (cas eulérien), de la non-linéarité de ces équations et de la dépendance du mouvement du front de choc aux conditions aux limites calculées via les équations de Rankine-Hugoniot, ce calcul est très lourd (voir [92] pour le calcul des chocs) et n'est pas applicable au delà de la dimension 1. Ainsi, VONNEUMANN et RICHTMYER ont introduit dans [72] le concept de viscosité numérique : il s'agit d'ajouter à dans les équations (équation de la conservation de la quantité de mouvement et équation de l'énergie) un terme dissipatif de façon à lisser les chocs sur plusieurs cellules du maillage. Ce terme dissipatif est un terme de pression $q$ qui ne devient grand qu'au voisinage des chocs, permettant qu'un choc en formation augmente localement la pression, ce qui ralentit alors la mise en vitesse à l'avant du front de choc. Énergétiquement, ceci n'est pas défavorable à un bon bilan énergétique car cet état de pression interne plus forte (activation de la pression numérique $q$ par le choc) disparait en même temps que le choc qui lui a donné naissance restituant alors sous forme cinétique l'énergie prise au front de choc. Cette pression $q$ est donc telle que :
  1. les solutions des équations de la quantité de mouvement, de l'énergie et de continuité de la masse ne présentent pas de discontinuité ;
  2. le choc soit étalé sur un nombre fixé de cellules du maillage indépendamment de l'amplitude du choc et des conditions dans lesquelles se trouve le matériau ;
  3. les équations de Hugoniot (conservation de l'énergie, de la masse et de la quantité de mouvement) doivent rester valables à une échelle très supérieure devant l'épaisseur du front de choc.
ce qui se traduit dans l'expression analytique de $q$ parH.8 :
  1. $q \propto \frac{d \, {\dot{x}}}{d {x}}$ ;
  2. $q \propto \Delta x$ et $q \propto \rho$ pour que l'impact de $q$ dans l'équation de conservation de la quantité de mouvement soit indépendant de l'amplitude du choc (définie par $\frac{\rho}{\rho_0}$) ;
  3. $q \propto \frac{d \, {\dot{x}}}{d {x}}$, voir un ordre supérieur.
En utilisant les règles précédentes, et en respectant les dimensions de $q$ (qui est une pression), on obtient :
\begin{displaymath}
\left\{
\begin{array}{rclcl}
q & = & \kappa \cdot \rho...
...d \frac{d \, {\dot{x}}}{d {x}} \ge 0
\end{array}
\right.
\end{displaymath} (H.3)

avec $\kappa$ une constante positive sans dimensionH.9. Un profil de densité comportant un choc lissé sur 4 cellules est présenté en figure H.2, pour du cuivre. Cette figure ne comporte pas de lissage lors du tracé, les effets de `` marches d'escalier '' sont donc ceux produits par le maillage choisi.

Figure: choc lissé par la viscosité numérique dans un échantillon de cuivre
\rotatebox{-90}{\includegraphics[height=\textwidth]{figures/choc.ps}}



Notes

... traitésH.7
En fait, dans un écoulement physique, la viscosité ajoute un terme de pression et la diffusivité thermique un terme d'énergie spécifique, qui empèche la formation d'une discontinuité. Ces termes sont négligeables dans le cas d'un écoulement isentropique, mais conduisent à une épaisseur caractéristique du front de choc (c'est à dire un gradient fini) lors d'un choc. Cette épaisseur est d'autant plus petite que le choc est fort, de l'ordre de quelques libres parcours moyens dans les gaz et de l'ordre de quelques mailles du réseau cristallin dans les solides.
... parH.8
$x$ désignant l'abscisse eulérienne dans le sens de la propagation du choc
... dimensionH.9
Pour plus de précisions, voir [100, chap. 1 et page 377].
Mathias.Bavay_at_ingenieurs-supelec.org - juillet 2002